Réunion suite au droit d’alerte du CSE : crédit d’heures ou temps de travail effectif ?

Réunion suite au droit d’alerte du CSE : crédit d’heures ou temps de travail effectif ?

Dans une décision rendue le 9 novembre 2022, la Chambre sociale de la Cour de cassation a rappelé que le temps passé par les membres de la délégation du personnel au CSE à l’exercice de leur droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes s’impute sur leur crédit d’heures de délégation.

L’article L. 2312-59 du code du travail indique que si un membre de la délégation du personnel au comité social et économique constate, notamment par l’intermédiaire d’un travailleur, qu’il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l’entreprise qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché, il en saisit immédiatement l’employeur. Cette atteinte peut notamment résulter de faits de harcèlement sexuel ou moral ou de toute mesure discriminatoire en matière d’embauche, de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de classification, de qualification, de promotion professionnelle, de mutation, de renouvellement de contrat, de sanction ou de licenciement.

Réunion suite au droit d’alerte du CSE : crédit d’heures ou temps de travail effectif ?L’employeur procède sans délai à une enquête avec le membre de la délégation du personnel du comité et prend les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation.

Par ailleurs, L’article L. 2315-11 du code du travail indique qu’est payé comme temps de travail effectif le temps passé par les membres de la délégation du personnel du comité social et économique.

  • 1° A la recherche de mesures préventives dans toute situation d’urgence et de gravité, notamment lors de la mise en œuvre de la procédure de danger grave et imminent prévue à l’article L. 4132-2 ;
  • 2° Aux réunions du comité et de ses commissions, dans ce cas dans la limite d’une durée globale fixée par accord d’entreprise ou à défaut par décret en Conseil d’Etat ;
  • 3° Aux enquêtes menées après un accident du travail grave ou des incidents répétés ayant révélé un risque grave ou une maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave ;

Ce temps n’est pas déduit des heures de délégation prévues pour les membres titulaires de la délégation du personnel du comité social et économique.

En l’espèce, des membres élus au sein du CSE d’un Etablissement public et industriel avaient informé l’employeur de ce qu’ils entendaient faire usage de leur droit d’alerte sur le fondement de l’article L. 2312-59 du Code du travail (pour un motif lié à une discrimination à l’encontre d’une salariée).

Dans ce cadre, l’employeur a convié les membres élus du CSE à une réunion, à laquelle certains d’entre eux ont assisté.

Les membres de la délégation du personnel au CSE ont saisi la juridiction prud’homale de demandes tendant à voir condamner l’employeur au versement aux demandeurs présents à la réunion du CSE relative à l’alerte, la rémunération afférente au temps passé à cette réunion. En effet, ces derniers considéraient que le temps passé à cette réunion devait être rémunéré comme du temps de travail effectif, sans être déduit des heures de délégation.

La Cour d’appel ayant fait droit aux demandes des élus du CSE, l’employeur a formé un pourvoi en cassation.La Cour de cassation rejette ces arguments, et estime que la réunion avait été organisée par l’employeur à la demande des membres de la délégation du personnel au comité social et économique ayant exercé leur droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes, ce dont il résultait que le temps passé à ladite réunion devait être déduit de leur crédit d’heures de délégation.

Sources : Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 9 novembre 2022, 21-16.230

Règlement des heures de délégation :

Règlement des heures de délégation :

L’employeur est tenue de payer sa rémunération à l’échéance prévue et saisir ensuite, si elle entendait contester l’usage des heures de délégation.

“…il est important de noter que pour les représentants du personnel participant à une grève, leur mandat représentatif ne se trouve pas pour autant suspendu ; que la grève n’est pas de nature à interrompre l’exercice des mandats des représentants du personnel et laisse à ceux ci la liberté de circuler dans l’établissement pour l’exécution de leurs missions ou le cas échéant, à assister à des réunions organisées à l’initiative de l’employeur ; que toutefois, la suspension du contrat de travail pour faits de grève emporte celle de l’obligation pour l’employeur de payer les salaires ; qu’en effet, selon la Cour de Cassation, l’obligation de verser les salaires se trouve dépourvue de cause en raison de l’inexécution momentanée de l’obligation de travail ; que lorsque celui qui est titulaire d’un mandat exerce son droit de grève, son contrat de travail est suspendu, au même titre que n’importe quel salarié ; que la Cour de Cassation précise que le salarié qui s’est associé au mouvement de grève doit être légalement considéré, sauf preuve contraire de sa part, comme gréviste pour toute la durée du moment de grève ; qu’en l’espèce, il résulte

des documents versés aux débats que Monsieur Y, lors du mouvement de grève, a expressément déclaré qu’il était en grève comme les autres salariés ; que par ailleurs, il ne rapporte aucun élément formel confortant la preuve de l’exercice de l’un quelconque de ses mandats durant cette période de grève ; qu’il n’est pas contesté que Monsieur Y a participé à la grève et a donc, de fait, cessé sa prestation de travail ; qu’en conséquence, le Conseil dit que c’est à juste titre que la société ……. a effectué une retenue sur le salaire du demandeur correspondant à ces jours de grève, celui-ci n’apportant aucun élément pouvant justifier une quelconque délégation au titre de ses divers mandats durant ce moment de grève ;

ALORS QUE l’employeur est tenu de payer à l’intéressé à l’échéance normale le temps alloué pour l’exercice de ses fonctions de délégué syndical, à charge pour lui de saisir ensuite la juridiction compétente de sa contestation sur l’utilisation qui avait été faite des heures de délégation, de sorte que la résistance qu’il oppose à la réclamation de l’intéressé au sujet du non-paiement des heures de délégation est nécessairement fautive, même en cas de participation à un mouvement de grève ; de sorte qu’en déboutant Monsieur Y de ses demandes indemnitaires au titre de la résistance fautive de la société …… France, tout en constatant que celui-ci était, compte tenu de la multiplicité de ses mandats, en délégation permanente, de sorte que pendant le mouvement de grève, il faisait nécessairement usage de ses heures de délégation et que, par conséquent, la société …….. était tenue de lui payer sa rémunération à l’échéance prévue et saisir ensuite, si elle entendait contester l’usage des heures de délégation, la juridiction compétente, la cour d’appel a violé les articles L. 2141-11, alinéa 2 et L. 2143-17, alinéa 2 du code du travail…”

Cass. soc., 13 déc. 2017, n° 16-19.042. Lire en ligne : https://www.doctrine.fr/d/CASS/2017/C55B262F68B20037728F9

Crédit d’heures des représentants du personnel :

Crédit d’heures des représentants du personnel :

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Effectif DP CHSCT CE

Ancienne DUP2

CE et DP

Nouvelle DUP

CE, DP et CHSCT1

Instance  regroupée5

CE + DP + CHSCT

Instance  regroupée5

CE + DP – DP + CHSCT – CE + CHSCT

Moins de 11  –  –  –  –  –
11 à 49 10  –
50 à 74 15 2 20 20 18 16  12
75 à 99 15 2 20 20 19 16 12
100 à 150 15 5 20 20 21 16 12
151 à 199 15 5 20 20 21 16 12
200 à 299 15 5 20 21 16 12
300 à 499 15 10 20 16 12
500 à 999 15 15 20 16 12
1000 à 1499 15 15 20  – 16 12
1500 à 1999 15 20 20 16 12
2000 et plus 15 20 20 16 12

 

Effectif

Délégués syndicaux

d’Entreprise3

Délégués syndicaux

Centraux4

Représentant de la section syndicale6 Représentant syndical auprès du CE7
Moins de 11  –  –
11 à 49
50 à 74 12 4
75 à 99 12 4
100 à 150 12  – 4
151 à 199 18  4
200 à 299 18 4
300 à 499 18  4  –
500 à 999 24  4  20
1000 à 1499 24 4  20
1500 à 1999 24  4  20
2000 et plus 24 24 4  20

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1 : Lorsqu’un élu titulaire souhaite utiliser une ou plusieurs heures de délégation dont il dispose au titre du cumul prévu au 1° de l’article L. 2326-6 au-delà de son crédit d’heures mensuel, il informe l’employeur au plus tard huit jours avant la date prévue pour leur utilisation. Pour la répartition prévue au 2° de l’article L. 2326-6 d’une ou plusieurs heures de délégation, les membres de la délégation unique du personnel concernés informent l’employeur du nombre d’heures réparties au titre de chaque mois au plus tard huit jours avant la date prévue pour leur utilisation. L’information de l’employeur se fait par un document écrit précisant leur identité ainsi que le nombre d’heures mutualisées pour chacun d’eux.
Un accord de branche ou d’entreprise peut prévoir des dispositions plus favorables que celles décrites ci-dessus.
Sur le décompte des heures de délégation pour les représentants au forfait jours, voir  Heures, calcul des heures de délégation en cas de forfait jours.

2 : Dans les entreprises de 50 à 199 salariés, l’employeur peut décider, après avoir consulté les représentants du personnel, que les délégués du personnel assurent également les fonctions de représentants du personnel au comité d’entreprise, plus d’info  DUP – Délégation Unique du Personnel – Ancienne DUP.

3Loi travail, le crédit d’heures de délégation des délégués syndicaux a été augmenté, plus d’info.

4 : Article L2143-5 : Dans les entreprises d’au moins deux mille salariés comportant au moins deux établissements d’au moins cinquante salariés chacun, chaque syndicat représentatif dans l’entreprise peut désigner un délégué syndical central d’entreprise, distinct des délégués syndicaux d’établissement.

Ce délégué syndical central est désigné par un syndicat qui a recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, en additionnant les suffrages de l’ensemble des établissements compris dans ces entreprises.

L’ensemble des dispositions relatives au délégué syndical d’entreprise est applicable au délégué syndical central.

Dans les entreprises de moins de deux mille salariés comportant au moins deux établissements d’au moins cinquante salariés chacun, chaque syndicat représentatif peut désigner l’un de ses délégués syndicaux d’établissement en vue d’exercer également les fonctions de délégué syndical central d’entreprise.

5Article L2391-1 et suivant : Dans les entreprises d’au moins 300 salariés, un accord peut prévoir le regroupement d’au moins 2 instances représentatives du personnel (IRP) dans une instance unique. Chaque élu de cette instance unique bénéficie d’un crédit d’heures mensuel pour l’exercice de ses attributions.

L’instance unique peut être mise en place dans les entreprises d’au moins 300 salariés (ou les entreprises appartenant à une unité économique et sociale (UES) regroupant au moins 300 salariés, quel que soit leur effectif).

Cette instance ne peut être mise en place qu’en présence d’un accord majoritaire d’entreprise ou d’établissement, qui regroupe :

  • soit les délégués du personnel (DP), les membres du comité d’entreprise (CE) et du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT),
  • soit les DP et les membres du CE,
  • soit les DP et les membres du CHSCT,
  • soit les membres du CE et du CHSCT.

La création de l’instance unique peut avoir lieu à l’occasion :

  • soit de la constitution de l’une de ces 3 instances,
  • soit de leur renouvellement.

L’élection de chaque membre de l’instance est effectuée dans le respect des règles applicables à l’élection des membres du CE. Si le CE ne fait pas partie de l’instance unique, les règles prévues pour l’élection des délégués du personnel sont appliquées.

6 : Lorsqu’une section syndicale n’est pas représentative dans une entreprise ou un établissement d’au moins 50 salariés, il désigne un représentant de la section syndicale (RSS). Celui-ci agit au nom du syndicat auprès de l’employeur et assure la défense des salariés. Un RSS peut être désigné dans une entreprise de moins de 50 salariés, à des conditions spécifiques. Ses prérogatives sont les mêmes que celles du délégué syndical (DS), à l’exception du droit de négocier des accords collectifs.

Heures de délégation : Le RSS dispose d’au moins 4 heures de délégation par mois pour se consacrer à ses fonctions. Ces heures de délégation sont considérées comme du temps de travail effectif et payées à l’échéance normale. Durant ses heures de délégation, le RSS peut se déplacer en dehors de l’entreprise, circuler librement dans l’entreprise et prendre les contacts nécessaires à l’accomplissement de sa mission, notamment auprès d’un salarié à son poste de travail (sous réserve de ne pas gêner le travail des salariés). La section syndicale dispose d’un panneau d’affichage dans l’entreprise. Elle peut organiser, en dehors du temps de travail, des réunions mensuelles pour les salariés. Elle peut distribuer des tracts syndicaux. Le RSS bénéficie du statut de salarié protégé contre le licenciement. Dans les entreprises de moins;de 50 salariés, le DP désigné comme RSS ne bénéficie pas de crédit d’heures spécifique, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, mais peut utiliser son crédit d’heures de DP pour l’exercice de ses fonctions de RSS.

7 : Article L2325-6 : L’employeur laisse le temps nécessaire à l’exercice de leurs fonctions, dans la limite d’une durée qui, sauf circonstances exceptionnelles, ne peut excéder vingt heures par mois :

1° Aux membres titulaires du comité d’entreprise ;

2° Aux représentants syndicaux au comité d’entreprise, dans les entreprises de cinq cent un salariés et plus ;

3° Aux représentants syndicaux au comité central d’entreprise dans les entreprises de cinq cent un salariés et plus, mais dont aucun des établissements distincts n’atteint ce seuil.

Calcul des heures de délégation en cas de forfait jours :

Calcul des heures de délégation en cas de forfait jours :

Article archive Comité d’Entreprise avant le 01/01/2020

La loi Travail précise que le crédit d’heures doit être regroupé en demi-journées qui viennent en déduction du nombre annuel de jours travaillés prévu par la convention individuelle de forfait jours. Une demi-journée correspond à 4 heures. La référence de l’heure syndicale se décompte à partir d’une semaine de 40 heures !

Cette règle ne s’applique toutefois qu’à défaut d’accord collectif (d’entreprise ou de branche).

Calcul des heures de délégation en cas de forfait jours :Ce calcul des heures de délégation des salariés en forfait jours s’applique également à la DUP, aux délégués syndicaux, au représentant de la section syndicale, à l’instance unique et au CHSCT.
Loi Travail, Article 28 – II.-Les articles L. 2142-1-3, L. 2143-13, L. 2143-15, L. 2315-1, L. 2325-6, L. 2326-6, L. 2393-3 et L. 4614-3 du même code sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :
« Sauf accord collectif contraire, lorsque le représentant du personnel élu ou désigné est un salarié mentionné à l’article L. 3121-58, le crédit d’heures est regroupé en demi-journées qui viennent en déduction du nombre annuel de jours travaillés fixé dans la convention individuelle du salarié. Une demi-journée correspond à quatre heures de mandat. Lorsque le crédit d’heures ou la fraction du crédit d’heures restant est inférieur à quatre heures, le représentant du personnel en bénéficie dans des conditions définies par un décret en Conseil d’Etat».

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