Droit d’alerte du Comité d’Entreprise :

Droit d’alerte du Comité d’Entreprise :

 

Droit d'alerte du Comité d'EntrepriseLorsque le comité d’entreprise (ou un comité central d’entreprise) a connaissance de faits pouvant affecter la situation économique de l’entreprise, il peut demander des explications à l’employeur. Si les réponses sont jugées insuffisantes ou si elles confirment la situation détectée, le comité d’entreprise peut décider d’adresser un rapport à la direction et aux commissaires aux comptes. Les informations communiquées ont un caractère confidentiel,  art. L. 2325-43 complété.

Lorsque l’entreprise ne possède pas de comité d’entreprise, ce droit d’alerte relève des délégués du personnel.

Depuis le 1er janvier 2016, le droit d’alerte est étendu au contrôle de l’utilisation des aides publiques : L’employeurs doit consulter le comité d’entreprise sur la politique de recherche et de développement technologique de l’entreprise, les aides publiques en faveur des activités de recherche et de développement sont susceptibles d’être suspendues.  En tant que membre du CE si vous constatez qu’il y a un souci dans l’utilisation de ces aides, vous pouvez en demander justification à l’employeur. Cette demande fera l’objet d’une inscription à l’ordre du jour de la prochaine réunion. Vous devez pour ces questions également établir un rapport si vous n’obtenez pas de justification de la part de l’employeur ou s’il confirme que son utilisation n’était pas conforme.

Lorsque le comité d’entreprise constate que tout ou partie du crédit d’impôt n’a pas été utilisé conformément à l’article 244 quater C du code général des impôts, il peut demander à l’employeur de lui fournir des explications.
Cette demande est inscrite de droit à l’ordre du jour de la prochaine séance du comité d’entreprise.
Si le comité d’entreprise n’a pu obtenir d’explications suffisantes de l’employeur ou si celles-ci confirment l’utilisation non conforme de ce crédit d’impôt, il établit un rapport.
Ce rapport est transmis à l’employeur et au comité de suivi régional, créé par le IV de l’article 66 de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012, qui adresse une synthèse annuelle au comité national de suivi,  Code du travail - Article L2323-56.

Qui paye la mission du droit d’alerte ?

Mission financée par l’entreprise.

Fréquence du droit d’alerte :

Il n’est possible que d’en faire un par an.

Quels faits justifient l’alerte du CE :

La loi ne fixe aucune liste de faits préoccupants,  c’est le comité d’entreprise qui juge de la gravité et des conséquences sur la vie économique de l’entreprise, il devra apprécier la pertinence des éléments qu’il invoque au vu de la situation économique de l’entreprise.

Voici quelques exemples :

  • Suppression d’un service ;
  • Baisse importante du chiffre d’affaires ;
  • Baisse importante de commandes ;
  • Difficultés de trésorerie ;
  • Perte de clients importants ;
  • Retards importants et réguliers dans le paiement des salaires ;
  • Variation du stock très important

Dans la pratique,  il est normal de se demander à partir de quand, une situation économique difficile justifie l’exercice de ce droit d’alerte par le Comité d’Entreprise ? Dans cette affaire, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 21 septembre 2016, 15-17.658, l’employeur contestait la légitimité du droit d’alerte exercé par le comité d’entreprise. Pour rejeter cette contestation, la Cour de cassation précise que la Cour d’appel, a pu légitimement retenir que la situation financière de la société était extrêmement délicate dans la mesure où son capital social était détenu intégralement par la société mère, cette dernière ayant été contrainte de lui apporter mensuellement depuis le début de l’année 2012, une somme de 350 000 euros à 400 000 euros afin de lui permettre de faire face au paiement des salaires et à la trésorerie. En conséquence, le Comité d’Entreprise devait pouvoir obtenir des informations sur la stratégie de la société mère à l’égard de sa filiale, en raison de la situation de dépendance de cette dernière. Faute d’informations suffisantes, le recours au droit d’alerte était parfaitement justifié.

Déroulement de la procédure du droit d’alerte :

Phase 1 du droit d’alerte :

Première réunion de CE : L’ordre du jour de cette réunion  doit indiquer l’éventualité du déclenchement de la procédure de droit d’alerte.

Les questions sont obligatoirement inscrites à l’ordre du jour de la réunion suivante du comité. Le Code du Travail indique que l’employeur doit toujours répondre aux questions du Comité d’entreprise, Le chef d’entreprise doit apporter, au cours de la réunion, des réponses précises et motivées, éventuellement accompagnées de documents. Le CE peut également provoquer une réunion extraordinaire à la demande de la majorité de ses membres.

Phase 2 du droit d’alerte :

Les réponses sont rassurantes pour le comité d’entreprise, l’alerte peut être stopper (formalisation dans le Pv).
Les réponses sont inquiétantes, un rapport est alors établi par le comité d’entreprise qui peut se faire assister par un expert-comptable rémunéré par l’employeur.
Le comité d´entreprise et l’expert-comptable peuvent s´adjoindre avec voix consultative deux salariés de l´entreprise choisis pour leur compétence et en dehors du comité d´entreprise. Ces salariés disposent de cinq heures chacun pour assister le comité d´entreprise ou la commission économique en vue de l´établissement du rapport. Ce temps leur est payé comme temps de travail.

Phase 3 du droit d’alerte :

Une fois établi, le rapport qui intégré les différentes observations,  est transmis à l’employeur, au commissaire aux comptes s’il existe, et présenté en réunion du CE.

Confidentialité des informations :

Les informations concernant l’entreprise communiquées au comité d’entreprise ont par nature un caractère confidentiel. Toute personne pouvant y accéder est tenue à leur égard à une obligation de discrétion . Les élus ne pourront pas transmettre ces informations aux salariés ou à toute autre personne qui ne serait pas tenue à une obligation de confidentialité.

Exemple récents de syndicats qui déposent un droit d’alerte :

Air France : la CFDT et la CGT déposent un droit d’alerte

Confidentialité et obligation de discrétion pour les représentants du personnel :

Confidentialité et obligation de discrétion pour les représentants du personnel :

Confidentialité et obligation de discrétionL’article  L. 2325.5 du code du travail détermine le cadre de la protection de l’entreprise contre toute fuite d’informations stratégiques.

Les membres du Comité d’Entreprise (CE) sont tenus au secret professionnel pour toutes les questions relatives aux procédés de fabrication.Les membres du Comité d’Entreprise et les représentants syndicaux sont tenus à une obligation de discrétion à l’égard des informations revêtant un caractère confidentiel et présentées comme telles par l’employeur.

Les procès-verbaux des réunions du CE peuvent être diffusés ou affichés sous réserve de ne pas enfreindre cette obligation de discrétion.

Cette obligation de secret et de discrétion est valable pour tous les membres du CE à savoir :

  • les membres élus, titulaires ou suppléants,
  • les représentants syndicaux au comité,
  • les différents experts auxquels le CE peut recourir, expert-comptable, expert en nouvelles technologies et expert libre,
  • les experts et les techniciens auprès des commissions spécialisées,
  • les salariés de l’entreprise susceptibles d’assister le CE ou la commission économique dans le cadre de la procédure d’alerte,
  • les représentant du CE au conseil d’administration ou de surveillance.

Article L2325-22

Le Comité d’Entreprise peut créer des commissions pour l’examen de problèmes particuliers.
Il peut adjoindre aux commissions, avec voix consultative, des experts et des techniciens appartenant à l’entreprise et choisis en dehors du comité. Les dispositions de l’article L. 2325-5 relatives au secret professionnel et à l’obligation de discrétion leur sont applicables.Les rapports des commissions sont soumis à la délibération du comité.

Suivant  l’article L. 2325-5 du code du travail, l’obligation de discrétion ne peut jouer que si l’information présente un caractère confidentiel et est donnée comme telle par le chef d’entreprise ou son représentant.

Les membres du Comité d’Entreprise et les représentants syndicaux sont tenus à une obligation de discrétion à l’égard des informations revêtant un caractère confidentiel et présentées comme telles par l’employeur.
Il est nécessaire que ces deux conditions soient réunies. Si l’employeur ne précise pas expressément au cours de la réunion du CE qu’il s’agit d’une information confidentielle, l’obligation n’existe pas. En effet, cette précision de confidentialité doit être formalisée dans le procès verbal de la réunion du CE.

Néanmoins, la loi considère, dans certains cas, que les informations transmises au Comité d’Entreprise sont « réputées confidentielles » ou confidentielles « par nature » : Il s’agit des informations comptables (  Code du travail, art. L. 2323-10) et de celles données dans le cadre d’une procédure d’alerte économique ( Code du travail, art. L. 2323-82 : « Les informations concernant l’entreprise communiquées en application de la présente sous-section ont par nature un caractère confidentiel. Toute personne pouvant y accéder est tenue à leur égard à une obligation de discrétion »).
Elles sont « réputées confidentielles » et donc elles sont par nature confidentielles, que l’employeur l’ait rappelé ou pas. À ce titre, elles ne peuvent donc pas être divulguées par les membres du CE.

Informations sensibles sur l’entreprise :

Secret professionnelDans le cadre de votre mandat, votre employeur porte à votre connaissance de très nombreuses informations sensibles sur l’entreprise et ses salariés. Dans ce cadre, vous êtes tenu à la discrétion et au secret à l’égard de certaines d’entre elles, que vous ne pouvez donc aucunement divulguer.

Code du travail – Article L2325-5 : Les membres du comité d’entreprise sont tenus au secret professionnel pour toutes les questions relatives aux procédés de fabrication.

Les membres du comité d’entreprise et les représentants syndicaux sont tenus à une obligation de discrétion à l’égard des informations revêtant un caractère confidentiel et présentées comme telles par l’employeur.

Comment juger de la confidentialité :

L’obligation de discrétion s’applique nécessairement à tous les renseignements que vous recevez de votre employeur pour lesquels il vous a expressément précisé qu’ils revêtaient un caractère confidentiel. De ce fait, si l’employeur ne fait pas part du caractère confidentiel de l’information, il ne peut vous reprocher la divulgation de son contenu, sauf si cela nuit fortement ou porte préjudice à l’entreprise.

Cour de Cassation, Chambre sociale, du 12 juillet 2006, 04-47.558 : Selon l’article L. 432-7, alinéa 2, du code du travail, les membres du comité d’entreprise et les représentants syndicaux ne sont tenus à une obligation de discrétion qu’à l’égard des informations présentant un caractère confidentiel et données comme telles par l’employeur ou son représentant. Dès lors, justifie légalement sa décision le jugement qui constate que le procès-verbal de la réunion du comité d’entreprise ne mentionne pas le caractère confidentiel des informations données par l’employeur.

Inversement l’employeur ne pas pas signifier systématiquement un caractère secret à toutes les informations qu’il vous transmet, cela pourrait caractériser une entrave au fonctionnement de votre comité d’entreprise.

Quelles sanctions en cas de non-respect de la confidentialité :

Une violation de l’obligation de discrétion peut  justifier une sanction disciplinaire et pourrait également conduire à demander des dommages et intérêts en réparation du préjudice. Dans le cadre d’une révélation d’un procédé de fabrication, vous encourez une peine d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende.

Code du travail – Article L1227-1 : Le fait pour un directeur ou un salarié de révéler ou de tenter de révéler un secret de fabrication est puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 30 000 euros. La juridiction peut également prononcer, à titre de peine complémentaire, pour une durée de cinq ans au plus, l’interdiction des droits civiques, civils et de famille prévue par l’article 131-26 du code pénal.

 – Quelle conséquence au manquement d’un élu à l’obligation de confidentialité  ?

Le fait, pour un élu, de diffuser auprès de tout le personnel une information présentée au CE comme confidentielle par l’employeur, ne justifie pas son licenciement dès lors que cette communication n’entraîne pas de préjudice pour l’entreprise,  Cour administrative d’appel de Douai, 3e chambre, 7 juillet 2016, n° 15DA00610