Expert habilité : la délibération du CSE doit être précise

Expert habilité : la délibération du CSE doit être précise

Expert habilité par le CSE

Expert habilité par le CSE

 

Dans cette affaire, le CHSCT avait été informé, sur divers points relatifs à un projet de déménagement. Les informations transmises étaient : personnels concernés, travaux liés au déménagement, calendrier et modalités du déménagement, etc.

À cette occasion, les élus du CHSCT, (devenu entre-temps le CSE ) ont voté à l’unanimité le recours à un expert agréé (c. trav. art. L. 2315-94). La délibération est rédigée comme suit : « déménagement des salariés de [Adresse E], avancement des travaux et des aménagements de [Adresse A], [Adresse B], [Adresse C] et [Adresse D] ».

Contestant cette résolution du CHSCT, l’employeur a saisi le président du tribunal judiciaire (c. trav. art. L. 2315-86). Celui-ci a donné gain de cause à l’employeur en annulant la délibération du CHSCT, au motif que celle-ci ne permettait pas de définir si elle se justifiait :

  • Par un risque grave, en application du 1° de l’article L. 4614-12 du code du travail (aujourd’hui, de l’article L. 2315-94 du code du travail).
  • Ou par un projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, en application du 2° du même article.

Les élus ont saisi la Cour de cassation pour contester cette annulation, soutenant que l’expertise était justifiée par un projet important, mais en vain. La Cour de cassation a approuvé l’annulation de leur délibération du fait de son imprécision sur le cas de recours à l’expert. Les représentants du CSE qui souhaite recourir à un expert doivent formuler précisément dans leur délibération le motif de recours à cet expert, ici un expert habilité.

 

Mise à disposition du personnel par l’entreprise au profit du CSE

Mise à disposition du personnel par l’entreprise au profit du CSE

Le code du travail n’énonce rien au sujet du prêt par l’entreprise d’un salarié au CSE. Néanmoins il semble avisé de cadrer juridiquement ce dispositif pour éviter les mésententes qui pourraient survenir entre le CSE, la direction et les salariés eux-mêmes. Les conditions de la mise à disposition peuvent être sécurisées dans une convention permettant aux différentes parties de s’y référer si nécessaire.

Avec quel budget le salarié du CSE prêté est pris en charge ?

L’accord ou la convention statue sur les clés de répartition budgétaire des salaires et charges des personnels mis à disposition. La répartition budgétaire se fait en fonction de la « destination finale » de la tâche réalisée. En effet, toutes les missions assurées dans le cadre des activités sociales et culturelles doivent être imputées au budget des ASC et vice-et-versa pour les missions rattachées  au fonctionnement du CSE.

Le prélèvement à la source sur la subvention de « fonctionnement » (0,2 %) des moyens matériels ou humains alloués n’est possible qu’avec l’accord express du Comité (Cass. Crim. 10-03-1922 n°91-81177).

La refacturation au Comité des salaires et charges sociales des personnels mis à disposition ne constitue pas une « activité économique » de l’employeur au bénéfice du Comité et par conséquent échappe à l’application de la TVA (réponse ministérielle).

Mise à disposition du personnel par l’entreprise au profit du CSELe statut du salarié du CSE mis à disposition :

Le salarié mis à disposition est sous l’autorité du CSE, mais il conserve des liens étroits avec l’employeur initial. Le salarié mis à disposition conserve tous les droits et devoirs attachés à son contrat de travail. Le salarié continue d’appartenir au personnel de l’entreprise prêteuse ; il garde le bénéfice de l’ensemble des dispositions conventionnelles dont il aurait bénéficié s’il avait exécuté son travail dans l’entreprise prêteuse.

L’article L8241-2 du Code du travail peut servir de socle juridique pour rédiger une convention de mise à disposition (durée, identité des salariés concernés, mode de détermination des éléments refacturés). Deux éléments sont également indispensables :

  • L’accord exprès du salarié concerné ;
  • Un avenant au contrat de travail signé du futur salarié du CSE.
    • Le contexte de la mise à disposition : l’employeur doit nécessairement obtenir l’accord du salarié.
    • La durée de l’opération : l’avenant peut prévoir la possibilité d’une révision de la durée de l’opération de mise à disposition, c’est-à-dire un raccourcissement ou un allongement, en accordant au salarié un délai de réponse.
    • La description et les caractéristiques du poste : doivent être obligatoirement précisés la description exacte du poste confié au salarié ainsi que ses caractéristiques, mais également la description des éventuels dangers liés au poste.
    • Le lieu de travail : l’avenant doit obligatoirement comporter la mention du lieu de travail.
    • La durée du travail : il s’agit d’une mention obligatoire.
    • La période probatoire : il s’agit d’une période d’essai mais sans possibilité d’une rupture du contrat de travail. En effet, le contrat ne peut être rompu mais le salarié est réintégré dans son poste d’origine. La durée de cette période est librement fixée par les parties.
    • Les conditions d’exécution de la mission : notamment concernant les accords collectifs, le règlement intérieur, le bénéfice des services de l’entreprise utilisatrice,
    • La rémunération : elle doit être versée par l’entreprise d’origine et facturée ensuite à l’entreprise utilisatrice. À défaut, il s’agit d’une mutation. Le contrat de travail avec la société prêteuse n’est ni rompu ni suspendu, ainsi les accords de salaire applicables dans cette entreprise sont applicables aux salariés mis à disposition. Par ailleurs, l’entreprise prêteuse doit rembourser les frais engagés par le salarié pour son activité professionnelle. Enfin, à l’issue de sa mise à disposition, le salarié retrouve son poste de travail ou un poste équivalent dans l’entreprise prêteuse sans que l’évolution de sa carrière ou de sa rémunération ne soit affectée par la période de prêt.

Répartition des droits et des devoirs de chacun, le CSE, le salariés du CSE, l’entreprise  :

L’exercice du pouvoir disciplinaire appartient à l’employeur, c’est-à-dire l’entreprise prêteuse. L’encadrement et le contrôle de l’exécution du travail appartiennent à l’entreprise utilisatrice qui donne les consignes et les directives au salarié. Cependant, il doit nécessairement consulter l’entreprise prêteuse s’il estime qu’une sanction disciplinaire est nécessaire. La responsabilité en termes de conditions de travail, ainsi qu’en termes de santé et de sécurité au travail appartient à l’entreprise utilisatrice. Cette dernière doit informer la société prêteuse concernant les absences du salarié. Elle s’engage également à informer immédiatement le prêteur de tout accident de travail dont serait victime le salarié, afin de permettre au prêteur de procéder à la déclaration de l’accident du travail.

Une décision de justice (Cass. soc. 23 mars 2016, n°14-14811) change la situation en concluant que les salariés mis à disposition d’un comité d’entreprise pour y accomplir un travail pour le compte de ce dernier et sous sa direction sont liés par un contrat de travail à cet organisme, lequel a dès lors la qualité d’employeur. A ce titre, il incombe donc, non pas à l’entreprise, mais au comité d’entreprise d’exercer son pouvoir disciplinaire à l’encontre de ces salariés… Une telle approche implique désormais que les Comités disposant de personnels mis à disposition se doivent de préciser le statut effectif et les obligations de chacun.

Rôle des représentants du personnel en cas de prêt de salariés :

La loi impose, pour la mise en œuvre d’un prêt de main-d’œuvre, la consultation du CSE de l’entreprise prêteuse à propos de la mise en place de cette opération et une information concernant les différentes conventions signées.

Mise à disposition du personnel par l’entreprise au profit du CSE

Convention de mise à disposition de personnel, conclue entre le CSE et l’entreprise

Le code du travail n’énonce rien au sujet du prêt par l’entreprise d’un salarié au CSE. Néanmoins il semble avisé de cadrer juridiquement ce dispositif pour éviter les mésententes qui pourraient survenir entre le CSE, la direction et les salariés eux-mêmes. Les conditions de la mise à disposition peuvent être sécurisées dans une convention permettant aux différentes parties de s’y référer si nécessaire.

L’article L8241-2 du Code du travail peut servir de socle juridique pour rédiger une convention de mise à disposition (durée, identité des salariés concernés, mode de détermination des éléments refacturés). Deux éléments sont également indispensables :

  • L’accord exprès du salarié concerné ;
  • Un avenant au contrat de travail signé du futur salarié du CSE.

CONVENTION DE MISE À DISPOSITION DE PERSONNEL, CONCLUE ENTRE LE CSE ET L’ENTREPRISE

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Il est possible de modifier l’ordre du jour du CSE en début de séance par un vote à l’unanimité

Il est possible de modifier l’ordre du jour du CSE en début de séance par un vote à l’unanimité

La chambre criminelle admet que les représentants du CSE peuvent modifier à l’unanimité l’ordre du jour en début de séance.

Le secrétaire du comité central d’entreprise intervient en début de séance pour solliciter l’ajout d’un point à l’ordre du jour (« vote d’un mandat au secrétaire du CCE pour ester en justice pour entrave »). La modification de l’ordre du jour est adoptée à l’unanimité des membres présents, comme en atteste le procès-verbal rédigé à l’issue de cette réunion. Devant le tribunal correctionnel, l’employeur soutient que l’action en délit d’entrave est irrecevable au motif que la délibération qui en est à l’origine a été adoptée par les élus du personnel sur la base d’un point qui ne figurait pas dans l’ordre du jour adressé 8 jours auparavant aux membres du comité. De ce fait, du point de vue de l’employeur, les membres titulaires absents avaient été privés de toute possibilité de s’exprimer sur ce sujet.

Modification de l'ordre du jour du CSE

Modification de l’ordre du jour du CSE

Résumé :

Le délai de huit jours au moins avant la séance, dans lequel, en application de l’article L. 2327-14 du code du travail, dans sa version issue de l’ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail, l’ordre du jour du comité central d’entreprise est communiqué à ses membres, est édicté dans l’intérêt de ceux-ci afin de leur permettre d’examiner les questions à l’ordre du jour et d’y réfléchir. Justifie sa décision la cour d’appel qui, pour écarter l’exception d’irrecevabilité de la constitution de partie civile du comité central d’entreprise, prise de l’irrégularité de la délibération autorisant le secrétaire de ce comité à agir en justice du chef d’entrave, relève notamment qu’il résulte des pièces produites que, lors de la réunion de celui-ci, son secrétaire est intervenu en début de séance pour solliciter l’ajout d’un point à l’ordre du jour relatif au vote d’un mandat pour ester en justice pour entrave. En effet, il résulte du procès-verbal de ladite réunion, dont la Cour de cassation a le contrôle, que la modification de l’ordre du jour a été adoptée à l’unanimité des membres présents, de sorte qu’il en résulte que ces derniers ont accepté, sans objection, de discuter de la question du mandat, manifestant ainsi avoir été avisés en temps utile.Source : Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 13 septembre 2022, 21-83.914, Publié au bulletin

En cas de contestation de l’expertise pour risque grave décidée par le CSE, ce n’est pas à l’employeur de prouver qu’il n’existe aucun risque grave dans l’établissement

En cas de contestation de l’expertise pour risque grave décidée par le CSE, ce n’est pas à l’employeur de prouver qu’il n’existe aucun risque grave dans l’établissement

La Cour de cassation a validé l’annulation par un tribunal d’une expertise pour risque grave décidée par un CHSCT de La Poste au début de l’épidémie de covid-19. Le tribunal a estimé que l’existence d’un risque grave n’était pas établie après avoir constaté que la société avait pris des mesures de prévention adaptées.

La notion de risque grave justifiant le recours à un expert par le CSE

Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, le CSE peut déclencher une expertise « lorsqu’un risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel » est constaté (c. trav. art. L. 2315-94). La jurisprudence CHSCT est transposable au CSE, elle permet de cerner les situations de risque grave.

Dans l’affaire tranchée par la Cour de cassation le 21 avril 2022, la situation est inédite puisqu’elle s’inscrit dans un contexte jusqu’alors inconnu, l’épidémie de covid-19.

Un CHSCT de la société La Poste avait voté, le 7 mai 2020, le recours à une expertise pour risque grave et missionné l’expert pour qu’il détermine les risques encourus par les postiers dans leurs conditions de travail et qu’il émette des préconisations propres à minimiser les risques de transmission du covid-19 entre les agents. Le 7 juillet 2020, la société La Poste avait demandé au tribunal judiciaire d’annuler l’expertise demandée par le CHSCT, ce qu’il avait fait, en prenant en compte les mesures de prévention prises par l’employeur.

Pas de risque grave lié au covid-19 caractérisé, l’employeur ayant pris des mesures de prévention adaptées

La Cour de cassation précise que le vote du recours à une expertise pour risque grave sur le fondement de l’article L. 4614-12, 1°, du code du travail, face à l’épidémie de Covid-19, n’est pas justifié lorsque l’employeur tenu de prévenir autant que possible l’exposition de ses salariés au virus, en considération des modes de transmission faisant l’objet d’un consensus sur le territoire français, a rendu le port du masque obligatoire et a pris des mesures de désinfection, d’information et d’organisation de nature à assurer les conditions de distanciation sociale et d’hygiène conformes aux recommandations du gouvernement.
Ayant pris des mesures de prévention adaptées, l’existence d’un risque grave, au sens de l’article L. 4614-12 du code du travail, n’est pas caractérisée.

Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 21 avril 2022, 20-21.318

Possibilité pour le CSE d’afficher des éléments relevant de la vie personnelle d’un salarié sous certaines conditions

Possibilité pour le CSE d’afficher des éléments relevant de la vie personnelle d’un salarié sous certaines conditions

Il résulte des articles 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 9 du code civil et L. 2315-15 du code du travail que le respect de la vie personnelle d’un salarié n’est pas en lui-même un obstacle à l’application de l’article L. 2315-15 du code du travail, nonobstant l’obligation de discrétion à laquelle sont tenus les représentants du personnel à l’égard des informations revêtant un caractère confidentiel, dès lors que l’affichage par un membre de la délégation du personnel du comité social et économique d’informations relevant de la vie personnelle d’un salarié est indispensable à la défense du droit à la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, lequel participe des missions du comité social et économique en application de l’article L. 2312-9 du code du travail, et que l’atteinte ainsi portée à la vie personnelle est proportionnée au but poursuivi.

En l’espèce, le secrétaire du comité social et économique a procédé à l’affichage sur le panneau destiné aux communications de l’ancien CHSCT, d’un extrait des conclusions déposées par ce dernier au soutien d’une citation directe de la société, examinée par le Tribunal correctionnel le même jour. Cet extrait reproduisait le contenu d’un courriel adressé trois ans plus tôt par l’ancien Directeur de l’établissement au Directeur chargé des questions d’hygiène et de sécurité, libellé dans les termes suivants : « je fais suite à notre conversation téléphonique du […] et notre conversation orale du […] un tel écart dans la forme et le fond ne saurait se reproduire sans que cela vienne questionner ton aptitude […] pour la bonne forme merci de m’accuser réception de ce mail par retour ».

La Société a fait assigner le secrétaire du CSE à l’époque devant le Président du tribunal de grande instance, afin que soit ordonné, sous astreinte, le retrait de l’affichage au motif notamment de l’atteinte portée à la vie personnelle du Directeur chargé de la sécurité.

La Cour d’appel a débouté la société de sa demande en retenant que l’intérêt du courriel, qui révélait la position de la direction sur la communication autour de l’amiante, sujet source d’inquiétude pour les salariés, était suffisant pour justifier l’atteinte aux droits fondamentaux du salarié.

Ce raisonnement est cependant cassé par la Cour de cassation : la Cour d’appel aurait dû s’assurer que l’affichage était indispensable à l’exercice des missions du CSE et que l’atteinte portée à la vie personnelle du salarié était proportionnée au but poursuivi, démonstration qui n’était pas faite en l’espèce.

Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 16 février 2022, 20-14.416, Publié au bulletin

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